Le 12.11.17  En hospitalisation libre en psychiatrie, après une intervention chirurgicale.

 

Bon bah quand le corps prend de la place,

Quand le corps prend de la place, le casque peut être en paix.

Surprenant.

Comme si le corps ne laissait pas la place à l’angoisse.

Alors…

Comme des points de côté dans les épaules,

Les points de suture qui tirent sur l’abdomen.

Mais le casque en paix.

Elle en oublie les médicaments.

Elle en oublie qu’elle passe ses derniers jours en hôpital psychiatrique.

Elle en oublie la peur, l’appréhension du retour au domicile.

C’est comme si presque tout était simple.

Pas besoin de réfléchir des heures.

Quand une belle opportunité de travail se présente elle postule.

Quand elle hésite, elle le dit aux potentiels chefs.

Pas besoin d’un gros salaire.

S’occuper, payer son loyer, avoir du temps pour peindre et pour ses rendez-vous médicaux.

Elle veut travailler en lien.

Travailler avec des gens.

Pourquoi-pas servir vaguement à quelque chose.

Elle se sent capable dans sa tête.

Bientôt son corps le sera aussi.

Les choses impossibles habituellement pour sa tête semblent atteignables.

Julien lui dit « j’aime bien » quand elle lui montre sa lettre de motivation.

Elle les envoie sous antidouleurs tard le soir, pas aux bons mails, avec des corrections à faire.

Mais tant pis.

Elle le fait.

Elle ne l’aurait pas fait il y a quelques semaines, quelques mois.

Lisa, sa colocataire lui manque.

Sa maison aussi.

C’est la première fois qu’un lieu de vie en dehors de l’hôpital lui manque.

Elle a hâte de retrouver leur appartement, la vie du quartier…

Elle a hâte en ayant le casque en paix.

Le casque reste rarement en paix longtemps.

Elle profite de ce répit, de cette trêve.

Une trêve pour retourner voir la vraie vie, en dehors de quatre murs,

En dehors de rendez-vous quotidiens avec Le Disciple…

Soutenue par la nouvelle psychologue, La Recommandée.

Elle sait qu’elle peut réussir à vivre.

Alors elle a besoin de l’écrire.

Que c’est possible.

Que les émotions ne débordent pas tout le temps.

Que la modération n’est pas un gros mot.

Elle peut vivre en gris.

Sans le translucide ou le technicolor.

En gris.

Ses douleurs au corps lui imposent un rythme modéré.

Ne pas rien faire, ne pas forcer.

Etre dans une certaine mesure,

C’est presque nouveau,

C’est l’une des premières fois qu’elle s’en rend compte.

Elle ne comprend pas vraiment ce qui se passe.

C’est reposant.

Elle peut dormir sans crainte.

Au moins faire la sieste.

 

Une douleur constante au corps pour un casque en paix.